Prise en main de la population
rideau

A la mi-septembre, malgré des débuts cahotants, l'O.A.S. pouvait se flatter d'avoir réussi la première partie de son plan : prendre en main la population, encore que Susini  se plaignît que la structure ne fût réelle qu'au niveau du quartier et non à celui des immeubles !
C'est le moment que choisit Salan, réfugié à Alger dans un appartement, pour prouver au monde à quel point l'emprise de l'O.A.S. sur la population européenne était totale.
Le 21 septembre 1961, au cours d'une émission pirate, les Algérois furent invités à une série de manifestations destinées à présenter un front uni aux forces de répression. Le 23 septembre l'opération casseroles leur permit de se défouler sans danger en menant pendant des heures un charivari comme jamais la ville n'en avait entendu jusque-là. Tapant sur des instruments de cuisine, sur les volets en fer, sur des feuilles de tôle ils firent retentir les trois brèves et deux longues d'Algérie française pendant plus de cinq heures. On riait, on s'interpellait des balcons, on injuriait les gendarmes et les soldats du contingent.

pieds-noirs en algerie

Ces derniers, venus de métropole pour effectuer leur service militaire en Algérie comme près de trois millions de leurs aînés l'avaient fait depuis 1956, étaient particulièrement visés par les Algérois. Ils étaient les fils de ces métropolitains détestés qui apportaient leur aide à de Gaulle. Par des manifestations d'hostilité enfantines et stupides les malheureux pieds-noirs se forgeaient une réputation désastreuse dont la plupart auront à souffrir lorsqu'un an plus tard ils devront s'installer en métropole. Il leur faudra donner mille preuves de leurs qualités de création, de courage, d'opiniâtreté, il leur faudra montrer aux métropolitains leur détermination à être heureux, leur faire partager cet élan méditerranéen, cette amicale fraternité qui les caractérise et les unit pour effacer la déplorable réputation qui les avait précédés. Beaucoup se plaindront de l'accueil de la France en oubliant comment ils avaient eux-mêmes accueilli des bidasses qui ne faisaient que maintenir l'ordre à Alger, en oubliant aussi que les chefs de l'O.A.S. qu'ils avaient aveuglément suivis les avaient entraînés dans une voie désespérée et sans issue.

salan

La seconde manifestation prévue par Salan montra aux membres du Comité supérieur quelles étaient les limites de participation des Français d'Algérie à l'O.A.S.
Le chef suprême avait ordonné que le 25 septembre tout Alger fût pavoisé aux couleurs de l'organisation : pavillon noir et blanc frappé de la croix celtique. On se contenta de décorer les façades des immeubles de drapeaux tricolores. Alger qui devait présenter au monde le noir visage de la révolte et de la colère avait, au contraire, un air de fête ! Les Algérois étaient peu soucieux de faire repérer leur appartement par les services de police en arborant le drapeau noir. Contre le tricolore les gendarmes ne pouvaient pas sévir. Et ainsi on avait presque suivi les ordres de l'O.A.S. ! Dès qu'il fallait se mouiller, prendre position à visage découvert, il n'y avait plus personne.
Devant le danger, dira plus tard un ancien O.A.S., on avait peu de volontaires. Comme par hasard on devait rester à la maison, la femme était malade, le beau-père souffrant. Même à Bab-el-Oued, où c'étaient des durs, on avait peu de monde pour l'action. Les affiches, les tracts, la casserole, oui. Mais le reste... tenez, même pour tirer sur des Arabes... c'était difficile à trouver. Ils restaient O.A.S., fiers de l'être, fiers de le dire. Mais O.A.S. tranquilles ! Sans risques. »
Ce 25 septembre, seuls les édifices publics ou les entreprises furent pavoisés de noir et de blanc !
Salan, pour effacer cette pénible impression, ordonna pour le 28 septembre une opération embouteillage qui, à midi précis, bloqua le centre d'Alger. Là, au volant de sa voiture, klaxonnant Algérie française, tapant sur les portières ou la carrosserie en narguant la police, l'Algérois montrait sans danger son appui à l'O.A.S. Ce fut une réussite totale...
Mais Degueldre et ses deltas étaient là pour montrer que l'organisation n'était pas uniquement composée de braillards et de stratèges de Café du Commerce. Explosions, assassinats en série donnaient du sérieux à l'entreprise et allaient faire réfléchir les autorités.

anecdote
accueil
Accueil
Terrorisme du désespoir